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L’entrée dans sa réclusion

Pour l’accomplissement des devoirs de sa charge le Père PINET, gardien du couvent d’Hesdin et custode de Picardie, vint à Corbie. Le Père Jean PINET était un fervent franciscain désireux de faire revivre l’ordre d’après la Règle primitive. Il vit Colette et reconnut en elle une véritable fille de Saint François. De suite ces 2 âmes se comprirent.

Dès lors il devint son guide. Comme Colette ne pouvait trouver dans aucune maison religieuse la totale abnégation qu’elle cherchait, il lui proposa de vivre seule.

Il lui raconta la vie de ces personnes que l’on nomma Reclus, qu’il n’était pas rare de rencontrer dans le monde chrétien des solitaires et que leur vie était plus pénible que les habitants du désert mais qui avaient en compensation de leur isolement l’immensité du ciel, l’air pure et que ces captifs s’interdisaient toute communication avec les hommes.

Ce fut comme une révélation pour celle qui allait devenir Sainte. Son cœur se rempli enfin d’une joie intense à ces mots.

Cependant devant son entrée en Réclusion se dressa une barrière, L’abbé de Corbie, son tuteur. Elle devait obtenir son accord.

Colette trouva le lieu de sa réclusion, un petit recoin près d’une église paroissiale de Corbie Notre Dame de Corbie, appelée plus tard église Saint-Étienne, profanée à la révolution puis devenu chapelle Sainte-Colette et enfin puis transformée en orphelinat le 22/09/1867 et devenue de nos jours Sainte-Colette.

reclusoire de sainte Colette Corbie

Malheureusement pour elle son tuteur ne donna pas son consentement. Le temps passa, et Colette renouvela encore et encore sa demande.

Elle profita d’une fête en l’abbaye de CORBIE :

Le 17 septembre 1402, l’abbé Raoul était avec un certain nombre de convives, des vassaux, des seigneurs, des dignitaires ecclésiastiques, quand Colette pourtant très timide, se présenta au milieu de l’assemblée en se prosternant au pied de l’Abbé afin d’obtenir son consentement à sa demande de réclusion, elle était en lames, elle le pria, le supplia, tout en demandant l’appui de l’assemblée en invoquant la Passion du Christ. De ce fait l’abbé accepta sa demande.

Elle prépara son ermitage avec l’aide de l’abbé et de Damoiselle Guillemette GAMELINE, veuve de Jean Le SENECHAL, prévôt de CORBIE.

Voici comment était son futur lieu de vie :

De son oratoire, il y avait une petite ouverture fermée de barreaux de fer en croix de où la recluse pouvait voir l’autel, il y avait une trappe mobile afin qu’elle puisse fermer l’ouverture. A côté de cet oratoire il y avait ses modestes appartements pour le repos et le repas, de là elle pouvait entendre à travers une grille les personnes qui avaient besoin de parler.

L’abbé voulant honorer sa pupille présidât une cérémonie pour son entrée volontaire en réclusion, le Père PINET était bien entendu présent avec toute l’assemblée de Bénédictins. L’assistance était très émue en voyant cette jeune Colette alors âgée de 21 ans et 8 mois, se séquestrait volontairement du monde

Après une messe, elle entra avec bonheur et impatience dans sa nouvelle demeure. Elle fut enfin heureuse d’entendre le bruit métallique de clefs fermant la porte. L’abbé de Corbie apposa son sceau sur la porte

Sa vie dans la réclusion

Durant sa réclusion, la vie de Sainte Colette se résumait à cela : elle livrait son corps à dure et austère vie et faisait continuelle pénitence.

Autour de son corps elle avait ceint un très rude cercle de fer qui l’étreindrait si fort qu’il entrait dans sa chair. (Elle le gardera une longue partie de sa vie)

Les austères pénitences qu’elle s’infligeait volontairement rythmées sa vie : Jeûnes, veilles, oraison…

Une grande partie de la nuit était employé à des récitations de prières.

Elle appliquait comme cela toute la doctrine de la mortification.

Colette recevait ce qui lui été nécessaire par 2 amies dévouées : Jacquette LEGRAND et Marie SENECHAL.

Ses repas était très simples, elle ne mangeait pratiquement rien, un maigre potage et des légumes grossiers ainsi qu’un petit morceau de pain.

Elle commença par recevoir des visites, des personnes qui voulaient entendre sa doctrine. Parmi ces nombreux fidèles, il y eu Jacques GUYOT, frère de Jean GUYOT curé de Saint Martin de Corbie (paroisse qui en 1567 fut réuni avec celle de Saint-Étienne de Corbie), confesseur de la recluse. Elle lui apprit le psautier et plus tard en 1471 à 76 ans Jacques GUYOT devenu Clerc de la cour spirituelle de CORBIE et notaire public, rendit, avec 3 vieillards de CORBIE, un témoignage solennel à celle qui l’avait initié à la vie spirituelle.

Durant cette période, le Père FINET continua à rendre visite à Colette, afin de l’encourager, la diriger mais aussi pour la modérer dans ce qui aurait pu être excessif

Dans son reclusoir, Colette eut plusieurs visions de saint François d’Assise qui la présentait à Dieu comme la réformatrice de son ordre. Refusant de croire à ces visions, elle fut frappée de cécité et de mutisme pendant 3 jours. Acceptant enfin sa mission de rénover l’héritage franciscain, elle guérit et se mit à écrire ce qui lui avait été révélé.

Puis peu après elle eut comme vision un arbre mystérieux qui croissait et poussait avec une multitude de petits arbustes. Ils étaient magnifiques, mais Colette pris peur, pensant que ce fut l’œuvre du démon, elle arracha alors les branches les unes après les autres, mais à peine la tache terminée que sa cellule se remplie à nouveau. Ces arbustes ne la redoutaient pas ils étaient plutôt comme des amis familiers. Puis il lui fut dit que l’arbre principal, c’était elle-même et que la multitude d’arbrisseaux autours représentait les âmes en grand nombre qui viendraient s’abriter auprès d’elle et se former à son école.

Elle acquiesça à sa vision par un ecce ancilla : Voici votre servante.

Elle devait donc sortir de son reclusoir pour continuer sa mission, mais comment sortir de sa cellule alors qu’un vœu l’enchainait? Se confiant à Dieu, elle eut la parfaite connaissance de ce qu’elle devait faire

Emplacement reclusoir Sainte Colette

Emplacement du reclusoir Sainte Colette sur une photo d'aujourd'hui à Corbie 80800

 

 

Sortie du reclusoir

Vers le milieu du mois juillet 1406, les habitants de Corbie, pourtant habitués aux nombreux visiteurs étrangers qui venaient consulter Colette, s’étonnèrent de l’arrivé d’une pieuse caravane dans Corbie guidée par un vénérable religieux de Saint-François et par une dame de haute condition. Ils avaient un langage différent de celui de la Picardie, qui laissait deviner la grande distance parcourue pour arriver à Corbie.

Ils furent conduit au père Jean GUYOT, où ils furent reconnus, c’était le Père Henri de la Baume (ou Balme), un des rares disciples de Saint-François qui avait conservé l’esprit intact de St-François, il était originaire de Savoie et la baronne de Brisay, Isabeau de Rochechouart

Plusieurs miracles étaient attribués à cet homme d’église, et depuis Avignon il eut la recommandation par Marion Amente, une pieuse recluse, d’aller en Picardie, à Corbie auprès de Colette afin d’en être le soutien, car cette jeune servante de Dieu devait opérer de grandes choses pour le Salut du monde.

Ces deux personnages rencontrèrent donc Colette.

Le 23 juillet 1406 le père Henri partit pour Paris, pour s’adresser au cardinal légat de Benoit XIII, et obtint un pouvoir à l’évêque d’Amiens, celui de dispenser de la clôture perpétuelle Colette.

Le 4 Aout 1406 la sentence fut proclamée mais sous la condition, afin de calmer le mécontentement des bénédictins de l’abbaye, que Colette devait entrer au couvent des Bénédictines ou des Clarisses.

Colette était donc hors de reclusoir dans lequel elle fut recluse les 4 dernières années.

Visite chez le Pape

Pour l’accomplissement de ses visions, il lui fallait l’approbation de l’autorité suprême de l’église.

A cette époque, il y avait 2 même 3 successeurs de Saint-Pierre, l’un à Rome, l’autre en Avignon et un troisième quelque temps à Pise

En France, le pape reconnu était Pierre de Lune, qui avait pris le nom de Benoit XIII, il résidait à Nice.

Colette traversa donc la France pour Nice. La baronne de Brisay se chargea de tous les frais du voyage.

Une fois à Nice, elle eut plusieurs audiences avec le pape, les requêtes de sœur Colette lui paraissaient justes. Mais il prit le temps de lui donner son accord, car pour beaucoup de ses conseillers Colette était : “une jeune fille inconnue et d’une extrême simplicité pour un si grand ouvrage.”

Il voyait en Colette humilité, sagesse et prudence dans un esprit débordant de sève évangélique. Il lui fallait persuader ses conseillers.

Et bientôt une peste noire violente éclata sur Nice, une peste qui emporta plusieurs des conseillers qui s’opposaient à Sœur Colette. Certains y virent le doigt de Dieu.

Lors d’un dernier conseil, tous les conseillers donnèrent leur accord à la réforme voulue par celle qui deviendra Sainte Colette.

Donc frappé par la force d’âme de la jeune réformatrice de 25 ans et l’accord de ses conseillers, Benoit XIII lui donna le voile noir de clarisse et la nomma Abbesse de tous les monastères qu’elle ramènera à la ferveur des origines : non seulement pour les sœurs Clarisses, mais aussi pour les Frères mineurs et le Tiers-Ordre de Saint-François

Le pape lui permit même de faire consacrer les églises qu’elle fonderait par un évêque étranger si l’évêque diocésain s’y refusait. Il envoya ses bulles le 14 octobre 1406.

Sur la route, quand on s’adressa à Colette, on le fit sous le nom de Mère Colette ou abbesse. C’est à ce moment que Colette prit conscience de son nouveau grade car elle n’avait pas compris qu’elle était institué abbesse. Sa joie se changea en amertume, elle ne voulait que le bonheur de servir dans les maisons des filles de Sainte Claire. Elle envoya un express au pape lui demandant de la délivrer de ce fardeau.

Le pontife édifié par tant d’humilité lui répondit : ” Ce qui est fait, est fait et demeurera“. Le père Henri essaya de rassurer Colette, blessée dans son humilité, mais en vain elle ne prit jamais le titre d’abbesse ni même le nom de Mère.

Retour à Corbie

Colette prit alors le chemin vers sa ville natale, Corbie, afin de commencer son œuvre.

Sur la route Colette fut pris d’une forte fièvre qui la réduisit à l’extrême et l’empêcha même de parler et prier oralement.

Le père Henri et la Baronne de Brisay restèrent auprès de son lit en pensant que c’était ces derniers instants, et qu’avec elle s’éteindrait leurs derniers espoirs pour le salut de la chrétienté.

Quand une femme dame d’une grande beauté, pleine de douceur et modestie se présenta à eux afin de soigner celle qui devait devenir Sainte Colette. Elle prit deux jaunes d’œufs et replaça la langue de Colette tout en l’embrassant, puis elle disparut, et Colette se leva immédiatement complétement guérie.

En allant remercier cette dame, elle demanda à la pieuse caravane de rester à Rumilly pour commencer son œuvre. Au même moment les mêmes faveurs furent demandées mais à Bourg-En-Bresse.

Mais Colette refusa afin de s’enfermer dans une profonde retraite sur son sol natal de Picardie.

La caravane continua donc son chemin en direction de Corbie.

Elle arriva enfin à Corbie, mais les habitants ayant vu d’un mauvais œil son départ depuis sa sortie de réclusion, l’accueillirent le plus défavorablement possible. Une certaine hostilité s’installa entre eux et Colette.

Quant aux bénédictins de l’abbaye, ils voyaient avec dépit la jeune abbesse, disciple de Saint-François qui leur avait autrefois donné tant d’espoir.

Les bénédictins, entendant parler de l’établissement d’un couvent de l’ordre de Saint-François,  ne firent rien pour protéger Colette des injures, des calomnies.

Colette comprit qu’elle ne pourrait pas établir un couvent à Corbie et décida de l’installer à Noyon. Et là encore elle ne trouva que froideur et indifférence.

Elle reprit donc le chemin retour pour Corbie, afin de trouver asile. Mais encore une fois l’accueil fut hostile et toucha également ces amis ainsi on n’osa plus avoir de rapports amicaux avec elle, et encore moins la défendre.

Colette dut céder, et après un instant de prière dans la chapelle Sainte-Brigitte, elle décida de gravir la colline dominant Corbie pour se réfugier dans les carrières. Les yeux pleins de larmes, elle contempla Corbie et s’écria :

“Malheureuse Ville, on dira un jour ici fut Corbie!”.

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Sainte colette de corbie